Trois plongées cette fois-ci pour Wiseman : une dans les secrets d’alcove d’un monastère bénédictin assez obscur à l’orée des années 70 ; une dans la psyché humaine à travers le portrait d’une communauté mal soudée ; et une en austérité, puisque Essene est le film le plus spartiate de son auteur. Nous voilà donc dans un film d’hommes entre eux ou presque, puisqu’on nous présente une communauté de religieux assez fanatiques, qui non seulement ont quitté le vaste monde et ses vanités, mais passent également leur temps à réfléchir à l’inanité de nos désirs, à la force de leur foi et aux douleurs de la société ; vous leur fileriez une branche d’orties, ils s’en fouetteraient copieusement le dos. Le portrait que dresse Wiseman de ce groupe fait froid dans le dos, d’autant qu’il place au début de son doc l’interview d’un frère aussi aimable qu’une porte de monastère bénédictin : le gars répond par monosyllabes en montrant une face de dix mètres de long, et on se dit que la piété n’apprend pas la politesse. D’autant que les collègues de ce brave homme constituent une joyeuse compagnie de gens très éclectiques, depuis le moine contrit mélangeant allègrement la Bible et le Livre des Morts tibétain jusqu’au Japonais venant expier Hiroshima, dans une joyeuse cacophonie de croyances plus ou moins académiques. Et c’est bien là que le bât commence à blesser : les dissensions apparaissent, et nos pauvres moines vont de réunion en réunion pour tenter d’éteindre les conflits, en vain. Le film interroge ni plus ni moins ce qui fait le fond du cinéma de Wiseman, lui qui filme depuis toujours des communautés : le groupe induit-il obligatoirement l’homogénéité ? qu’est-ce qui rassemble les gens, mais aussi qu’est-ce qui les éloigne? http://shangols.canalblog.com/archives/2019/08/24/37587750.html
Le plus austère et le plus ésotérique des documentaires de Wiseman vus jusqu’à présent, et pour cause : le réalisateur le consacre à un monastère de l’État du Michigan, toujours dans la logique de l’immersion, au sein d’une communauté de moines bénédictins. La durée de Essene peut induire en erreur : comme les films de Wiseman de cette période (60s / 70s grosso modo), les 90 minutes peuvent laisser penser à un contenu resserré, saillant, précis, pointu. Mais le contenu autant que la forme en font un moment particulièrement difficile à suivre, car le documentariste américain y a concentré presque uniquement des captations de discours religieux ou de discussions entre les moines extrêmement ésotériques, le tout capté essentiellement en gros plan. Austérité absolue. 1h30 de rituels, en autarcie, qui donnent du fil à retordre pour saisir le fond du propos (il se pourrait bien qu’il n’y en ait pas mais cela serait étonnant de la part de Wiseman) : on sent que la
caméra se focalise sur les contradictions apparaissant au sein de la communauté, sur des tensions naissantes, et sur les tentatives (relativement infructueuses) de les résoudre. Tout juste ai-je ressenti une pointe d’ironie autour du paradoxe entre l’exaltation du bien dans les paroles et la rudesse de la manière de traiter les dysfonctionnements internes. Il y a notamment un des moines, un moine chef probablement, avec qui on n’a pas trop envie de rigoler… Pour le reste, le contenu même des discussions théologiques atteint un niveau de mystique qui m’est largement étranger et inconnu, avec un effet cumulatif particulièrement assommant. Des sermons et desprières en veux-tu en voilà, filmés en très gros plans statiques… Un projet pour le moins spartiate. La continuité dans l’œuvre de Wiseman est malgré tout assurée au travers de la notion d’enfermement bien que volontaire https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Essene-de-Frederick-Wiseman-1972
En 1963 il entreprend de produire la réalisatrice Shirley Clarke, qui a décidé de tourner The Cool World, adapté d’un roman de Warren Miller.
En 1966, avec des amis, il fonde une association d’aide sociale, l’Organisation for Social and Technical Innovation (OSTI), dont l’activité se prolongera jusqu’en 1973.
La production du film de Shirley Clarke le décide à produire et monter ses propres films. Son premier documentaire, Titicut Follies (1967), qui porte un regard critique sur un hôpital pour aliénés criminels, sera suivi sans discontinuer d’environ un film par an, notamment grâce au réseau de télévision de service public PBS et en particulier à la station WNET au New Jersey, grâce aussi à diverses fondations comme la Fondation Ford ou la Fondation MacArthur, grâce enfin à quelques coproductions avec la BBC et Arte France.
Dès 1970, afin de garantir l’indépendance de sa création, il crée sa propre société de production, Zipporah Films.
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