Un film émouvant sur un véritable chef-d’œuvre littéraire : l’échange épistolaire que le peintre entretenait avec son frère Théo, en qui il trouvait une personne à l’écoute de ses tourments et angoisses, et qui l’a soutenu jusqu’au bout.
La sensibilité à fleur de peau de Vincent ressort avec force dans son style à la fois poétique, précis et poignant. Les lettres sont lues par le comédien Philippe Clévenot et commentées par Pierre Dumayet.
Extrait d’un article de Harry Bellet (Le Monde, le 22 mars 2003)
Le réalisateur Robert Bober ne craint pas la difficulté. Les lettres adressées par Vincent Van Gogh à son frère Théo sont un des plus beaux moments de l’art épistolaire du XIXe siècle, et une clé pour la connaissance du peintre. Les transcrire dans un film relève de la performance.
D’autant que l’expérience avait été déjà tentée, en 1990, par Robert Altman (Le Monde du 15 mai 1990), qui s’en était tiré avec un très long métrage – plus de trois heures de projection. La présente émission ne dure que cinquante-deux minutes. C’est peu, et c’est beaucoup. […]
La correspondance de Vincent à Théo témoigne de la réelle humanité du peintre, de sa profondeur de pensée, et de la conscience qu’il a de faire, selon ses propres termes, « une peinture de voyou. » […]
Robert Bober refuse de créer une fiction. Les décors sont minimaux, sorte d’usine néo-gothique en ruine, ou librairie sombre. Le lecteur, Philippe Clévenot, une « gueule », s’il en fut, dit son texte d’une voix profonde de vieux fumeur blessé par la vie, voix étonnante, irritante au début, envoûtante à la fin.
Clévenot, acteur immense, a, depuis le tournage, rejoint Van Gogh au paradis des artistes ( Le Monde du 22 octobre 2001). Pour lui, il faut regarder ce film. Là-haut, Vincent a déjà dû faire son portrait.
« S’il arrive un malheur, nous le braverons ensemble ; mon frère, demeurons fidèles l’un à l’autre. »
Vincent Van Gogh à Théo, 1883.
Les deux tombes de Vincent et Théo Van Gogh, au cimetière d’Auvers-sur-Oise.
Robert Bober est un réalisateur, metteur en scène et écrivain français d’origine allemande, né en 1931 à Berlin. Réalisateur pour la télévision depuis 1967, il est l’auteur de près de cent-vingt films documentaires.
En août 1933, la famille Bober fuit le nazisme et s’installe à Paris. Robert Bober quitte l’école après le certificat d’études primaires. Il a été successivement tailleur, potier et éducateur. Dans les années cinquante, Bober rencontre François Truffaut, puis devient son assistant sur les films “Les Quatre Cents Coups “(1959), “Tirez sur le pianiste” (1960) et “Jules et Jim” (1962).
Dans les années 60 et 70, ses films explorent principalement la période de l’après-guerre et les conséquences de l’Holocauste.
En collaboration avec Pierre Dumayet, il réalise des portraits d’auteurs tels que Paul Valéry, Gustave Flaubert ou encore Georges Perec. En 1979, il réalise un documentaire en étroite collaboration avec ce dernier, “Récits d’Ellis Island”.
Pour la collection “Lire, c’est vivre” (de 1977 à 1985), toujours avec Pierre Dumayet, il réalise de nombreuses émissions sur la culture juive : “Les Récits hassidiques”, “Gog et Magog”, deux émissions d’après Martin Buber, “Du côté du Talmud”, mais aussi “Le Compagnon du tour de France” de George Sand, “Les Dernières Cartes” d’Arthur Schnitzler, “Pierrot mon ami” de Raymond Queneau ; un travail de mémoire imprègne ses films.
Aujourd’hui, considéré comme l’un des réalisateurs de documentaires les plus renommés notamment en France, il anime et participe à différentes rencontres publiques, des ateliers, ainsi que des débats et dialogues en milieux universitaire et scolaire.
Il a écrit plusieurs livres, tous édités par P.O.L. : “Quoi de neuf sur la guerre” ? (1993), “Berg et Beck” (1999), “Laissées-pour-compte” (2005), “On ne peut plus dormir tranquille quand on a une fois ouvert les yeux” (2010). En 2017 est paru un livre tiré de son film “Vienne avant la nuit”, qui reprend des images du film ainsi que son titre, des documents historiques, le texte écrit par Robert Bober lui-même et qu’il dit en voix off, augmenté par rapport au film. À lire aussi : “Par instants, la vie n’est pas sûre”, souvenirs des années de créations partagées avec Pierre Dumayet.
Robert Bober a obtenu le Grand Prix de la SCAM 1991 pour l’ensemble de son oeuvre.
(Source : La Scam, Tënk et Vendredi Distribution)