Marguerite Duras revient sur sa vie d’écrivain, évoque les personnages emblématiques de sa cosmogonie, le Vice-Consul, Lol V. Stein… D’autres invités y figurent, l’alcool notamment, comme adjuvant à l’écriture, au même titre que le doute, la solitude, etc. Benoît Jacquot et Yann Andréa, que l’on devine hors-champ, lui donnent la réplique, avec une discrétion admirative et amicale.
Marguerite Duras (1914-1996) dans sa maison de Neauphle-le-Château, trois ans avant sa mort, pour interroger encore l’acte d’écrire, la solitude qui le fonde, au bord de la folie, inévitablement… Mais Duras sait aussi être facétieuse, et retourner à son avantage les principes de l’interview qui alors devient dialogue – léguant le doute, avec lequel elle dit batailler sans cesse, à Benoît Jacquot, invité à répondre lui-même de ses préoccupations de cinéaste. Le dispositif, élémentaire, mis en place par Benoît Jacquot, est entièrement au service de cette parole : les plans fixes de Duras sont entrecoupés de loin en loin par des plans de cette maison, apparemment vide, en réalité peuplée des fantômes durassiens : le Vice-Consul en tête bien sûr, de nombreux amis de passage, mais aussi une mouche dont un jour elle a suivi l’agonie… Entre humour et pathos, les mots de Duras s’imposent avec leur coutumière autorité, prolongent le mystère d’une expérience de vie unique.
(Mathieu Capel)