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Cycle | Filmer la ville

« Bricks » de Quentin Ravelli

mercredi 23 avril 2025
à 18:30
Le Lieu documentaire, Maison de l'image, Strasbourg

Projection du film « Bricks » de Quentin Ravelli (83 mn, VOST), dans le cadre du cycle « Filmer la ville » organisé par le laboratoire SAGE (CNRS-Université de Strasbourg) et Le Lieu documentaire, avec le soutien et la participation de l’Agence de développement et d’urbanisme de l’agglomération strasbourgeoise (ADEUS).

En présence de Quentin Ravelli, réalisateur et auteur, et d’Anaïs Collet, chercheuse au laboratoire SAGE, maîtresse de conférences en sociologie à la Faculté des Sciences sociales, Université de Strasbourg.

Entrée libre et gratuite, dans la limite des places disponibles.

Info pratique : la salle de projection du Lieu documentaire est accessible aux personnes à mobilité réduite.

  • Quentin Ravelli
2017
  • Espagnol
83'
  • Survivance

Des carrières d’argile abandonnées aux crédits immobiliers impayés, les briques espagnoles incarnent le triomphe puis la faillite économique d’un pays.

Usines qui ferment la moitié de l’année, ville-fantôme curieusement habitée, guerre populaire contre les expropriations orchestrées par les banques : suivre le parcours d’une marchandise – les briques – donne un visage à la crise et dessine les stratégies individuelles ou collectives qui permettent de la surmonter.

« J’avais à l’esprit le tressage d’une natte liant ces différents éléments qui ne se rencontrent pas physiquement dans la réalité : le maire qui se bat pour remplir sa ville fantôme, les gens qui s’organisent pour se battre contre les banques afin de faire annuler les dettes, et bien sûr l’industrie de la brique. D’où la forme en mosaïque du film, le point de vue sur la crise se déplace sans cesse, ce qui permet de comprendre différentes facettes. » Quentin Ravelli

NOTE D’INTENTION DU REALISATEUR
BRICKS, UNE TRAVERSÉE DANS L’ESPAGNE EN CRISE
Par Quentin Ravelli

En Espagne, la crise continue à s’aggraver malgré les déclarations du gouvernement. Depuis 2007, le chômage est passé de 8% à plus de 19%, les salaires ont baissé et les services publics continuent à réduire leur voilure. De nombreux mouvements sociaux ont vu le jour et remis en cause l’influence des banques, les suppressions d’emploi, la corruption qui gangrène l’appareil d’État. Même le système parlementaire, stable depuis la fin de la dictature en 1974, s’est mis à se fissurer : la percée de Podemos, devenu en trois ans l’une des premières forces politiques, enraye l’alternance monotone de la droite et de la gauche au pouvoir. Contrairement à la France, et même si la contestation s’essouffle, la remise en question ne vient pas de l’extrême droite.

La crise du logement en Espagne : « No es una crisis, es una estafa ! »

Un des aspects les plus marquant de cette situation est la crise du logement : après avoir construit plus de maisons que la France et l’Allemagne réunies, la bulle immobilière a éclaté et les expulsions se sont généralisées, dans un pays où on estime qu’il y a plus de 5 millions de logements vides. Au moins 700 000 familles ont été menacées d’être mises à la rue car elles ne réussissaient pas à payer leurs crédits immobiliers. Ce sont des crédits élevés, inadaptés, impossibles à rembourser, qui se sont implantés jusque dans les strates les plus pauvres de la population. Ce qui justifie le slogan désormais populaire en Espagne : « Ce n’est pas une crise, c’est une arnaque ! »

En Espagnol, un mot résume toutes ces absurdités tragiques : le « ladrillo ». Au sens propre, c’est la « brique » dont sont fait la majorité des immeubles en Espagne. Au sens figuré, c’est le système politico-financier à l’origine de la spéculation et de l’effondrement du pays. Pour faire ressentir les aberrations du ladrillo sans accumuler les discours de victimes, le film suit la vie des briques rouges. Autour d’elles, se collent des personnages qui résistent, chacun à leur manière.

Des portraits sensibles et contradictoires

En croisant plusieurs fils, Bricks raconte la tempête sociale que traverse l’Espagne aujourd’hui. Le maire d’une ville nouvelle, construite dans les années 2000 et devenue une ville-fantôme, cherche à changer l’image de sa ville qui se remplit peu à peu. Une usine de briques de Castille survit en exportant des modèles de briques de façade qui portent des noms de Dieux grecs. Une femme équatorienne avec deux enfants empêche l’expulsion de son logement et se bat contre sa banque pour obtenir l’annulation de sa dette avec l’aide d’un des mouvements sociaux les plus puissants en Espagne : la Plateforme des Victimes du Crédit, ou Plataforma de los Afectados por la Hipoteca.

En évitant les discours d’experts, à partir de situations concrètes et sans discours préétabli, Bricks cherche à dresser des portraits de résistances qui ne sont jamais simples : le maire affronte une dure opposition, les ouvriers de l’usines paient leur crédit et ne se révoltent pas, les changements politiques n’ont pas radicalement modifié la crise du logement… Ces portraits permettent de voir l’Espagne comme un contre-point à la France d’aujourd’hui, sans l’idéaliser.

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UN LIVRE / UN FILM

Le film « Bricks » fait écho au livre « Les Briques rouges. Dettes, logement et luttes sociales en Espagne » (éd. Amsterdam), suit la vie d’une marchandise ordinaire sur laquelle repose un système entier de domination économique et politique.

Pour en savoir plus : www.editionsamsterdam.fr


BIOGRAPHIE

Quentin Ravelli est né en 1982. Il est sociologue, chargé de recherches au CNRS, écrivain. En croisant sociologie du travail, économie politique et ethnographie, il suit le parcours de marchandises « à risque » pour mieux comprendre les contradictions de la crise économique et leurs conséquences sociales. Sa thèse, « La Stratégie de la bactérie – une enquête au cœur de l’industrie pharmaceutique » a été éditée aux Editions du Seuil en 2015.

Écrivain, il est l’auteur sous le nom de Clément Caliari de deux romans publiés aux éditions Gallimard.

En 2011, il fait sensation avec « Retrait de marché », un premier roman satirique et corrosif mettant en scène la commercialisation massive d’un antibiotique présenté comme miraculeux…et finalement mortel. Le livre a été distingué par le prix littéraire des Grandes Écoles.

Le second roman, « Gibier » (Gallimard, 2013), raconte l’histoire d’une paysanne révoltée, qui traverse les grandes étapes de la Hongrie communiste au cœur d’un petit village producteur de betteraves à sucre.

Cinéaste résident à la Casa de Velázquez, Quentin Ravelli réalise un long métrage documentaire sur la crise immobilière espagnole : « Bricks ».

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