Les tchèques Jan et Eva Svankmajer sont connus depuis trente ans pour leurs films d’animation artisanaux, qui mêlent à un humour acerbe un sens du merveilleux volontiers absurde. Bertrand Schmitt et Michel Leclerc nous montrent ici que ces films ne sont que la part émergée d’une activité aux modes d’expressions multiples : gravure, peinture, céramique, poésie, invention d’objets ou d’animaux divers.
“Otesanek”, alors en tournage, raconte l’histoire horrifique d’une racine adoptée par un couple stérile, bientôt envahissante et carnivore. Mais comment animer une racine à partir de fagots et de branches coupées à la tronçonneuse ? Jan se prête au jeu de l’interview, en compagnie d’Eva, véritable instigatrice du projet, et les images du tournage révèlent l’imaginaire fantasque des Svankmajer. Par ailleurs, le couple est affairé au montage d’une exposition rétrospective de leurs oeuvres : parmi ceux-ci, un service de tasses sexué ou bien des portraits “tactiles”. Des extraits de “Quelque chose d’Alice”, “Possibilité de dialogue”, “En bas dans la cave”, “Les Conspirateurs du plaisir” dévoilent thèmes et techniques récurrents, au bénéfice d’une subjectivité affirmée. Cet univers retors et profondément érotique, en constante expansion, interdit qu’on le réserve aux seuls enfants : ici sont exploitées toutes les gammes du surréalisme, dont ils n’ont d’ailleurs jamais cessé de se réclamer.