Comment pénétrer l’univers énigmatique d’un peintre dépositaire de la tradition, obsédé avant tout par la lumière, la matière et les formes, un peintre contestataire de l’exégèse de son œuvre, qui a troqué le bavardage biographique contre l’intimité de son art ? En interview et à travers les témoignages pudiques de ses proches, Damian Pettigrew s’applique à restituer la personnalité de Balthus.
La caméra déambule lentement et discrètement dans l’atelier et la demeure de l’artiste, en bordure du lac de Thun en Suisse. Le peintre âgé, cigarette aux lèvres, visage aigu et grave, miroir à la main, dialogue avec sa compagne et assistante, Setsuko. Le contenu réaliste des tableaux – ses modèles de jeunes adolescentes, ses amis, ses maisons somptueuses – apparaît comme suspendu dans l’éternité. Les témoins, admiratifs, se souviennent : l’apprentissage au Louvre via la copie de toiles de Poussin, la restauration des murs de la VIlla Médicis dont il est devenu directeur. Le critique Jean Clair relève la composante sadienne de ses sujets, son élève, le peintre François Rouan l’imite avec tendresse, ses enfants évoquent “sa présence bénévole”.
