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Vrai de Vrai, festival du documentaire 2026 à Strasbourg

« Méandres ou la rivière inventée » de Marie Lusson et Émilien De Bortoli

samedi 07 mars 2026
à 16:00
Cinéma Le Cosmos, Strasbourg

Projection gratuite du film « Méandres ou la rivière inventée » de Marie Lusson et Émilien De Bortoli (73 mn, 2023, France, Étoiles de la Scam 2025) dans le cadre du « Festival VRAI DE VRAI 2026 | Les Étoiles du documentaire » proposé du 4 au 7 mars 2026 à Strasbourg.

Entrée libre et gratuite, dans la limite des places disponibles.

Le film sera précédé par une capsule vidéo de 3mn réalisée à partir d’archives de MIRA, Cinémathèque régionale numérique.

Info pratique : le cinéma Le Cosmos est accessible aux personnes à mobilité réduite.

Le festival est organisé par Le Lieu documentaire et la Scam, avec le soutien de la Cinémathèque du documentaire, d’Images en bibliothèque, de Strasbourg Eurométropole, de la Région Grand Est, de la DRAC Grand Est, et de la Safire Grand Est.

  • Émilien De Bortoli
  • Marie Lusson
2023
73'
  • Py Productions

Au milieu de l’été, une bande d’amis décide de descendre une rivière dans un radeau de fortune. Les obstacles, physiques et vivants, qu’ils rencontrent témoignent des transformations comme des altérations des cours d’eau par les humains.

Mêlant road-trip et parole scientifique, le film tisse des liens entre les mondes immergés et submergés dont les prismes multiples engagent une rencontre réparatrice entre humains et non-humains.

L’AVIS DE TÉLÉRAMA 

Un documentaire profond qui navigue entre road-trip et plaidoyer écologique.

Lents travellings au fil de l’eau, zooms et dézooms, ralentis, étonnantes scènes subaquatiques, cadrages inattendus, parfois à la limite de l’abstraction. Très gros plans où se révèlent graviers, débris de matière organique, larves et crustacés. Subtiles fluctuations sonores éclairées par un hydrologue acousticien. Cet assemblage composite mais cohérent révèle « un monde dans un monde », rend vivante la rivière. Ce n’est pas un hasard si le générique met sur le même plan humains et non-humains : « Les rivières : le Vistre, le Lez, la Vis, l’Hérault, le Vénéon, le Gardon de Sainte-Croix. Les peuples : des gammares, des éphémères, des trichoptères, des hémiptères, des plécoptères, des hérons. »

Dans le sillage des travaux de Bruno Latour, « Méandres ou la rivière inventée » donne à voir la domestication des cours d’eau au long des siècles, dans une logique extractiviste, pour fournir énergie, irrigation, boisson. Jusqu’à en faire des tuyaux artificialisés, ravageurs pour la faune et la flore. Pour les humains, des liens se sont perdus. Mais pas nos dépendances.

Faut-il restaurer ? Comment restaurer ? Les auteurs, par le commentaire en voix off, comme les experts, par leurs interventions pédagogiques, esquissent les problématiques, évoquent des pistes en se gardant de toute approche surplombante. Ils réussissent à fondre dans un même film exploration scientifique et expérience sensorielle.

— Samuel Gontier, extrait de Télérama, 18 novembre 2025

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L’AVIS DE TËNK

Le film s’intéresse à la restauration des rivières, qui consiste à redonner leur forme d’origine à des cours d’eau dont les méandres ont été supprimés pour un usage rationnalisé à des fins humaines. En complément de la parole des scientifiques, les cinéastes ressentent le besoin d’entrer en contact avec la rivière selon un autre type de connaissances : ils vont faire une expérience physique et sensible en descendant le cours d’eau sur un radeau qu’ils ont construit eux-mêmes.

Par des techniques d’approche et d’immersion, un simple rocher devient un support qui accueille une biodiversité riche et complexe, et la rivière un milieu désormais repeuplé d’une vie qui fourmille et chante. Au gré de ces perceptions sensibles, nous comprenons que nous ne sommes pas séparés de notre environnement, qui est avant tout un milieu de vie partagé.

— Vincent Deville
Maître de conférences en cinéma à l’université Paul-Valéry Montpellier 3

Entretien avec Marie Lusson, réalisatrice
Extrait du dossier pédagique

Les rivières sont aujourd’hui coupées par des digues ou des seuils, polluées par nos rejets industriels, urbains et agricoles. Leurs eaux et leurs graviers ont été désassemblés et fragmentés entre des usages multiples – production électrique, route, eau potable, bâtiment ou activité de loisir. À l’ère de l’anthropocène, le vivant et le machinique, le naturel
et l’artificiel s’entremêlent jusqu’à rendre impossible toute dissociation. Or, cela vient fragiliser les équilibres écologiques et menacer de nombreuses espèces. Pour y faire face, les États membres de l’Union européenne ont mis en place depuis les années 2000 un vaste programme de restauration.

Dans le cadre de la restauration écologique, les projets techniques doivent prendre encompte l’ensemble des élément qui composent la rivière soit tout autant l’action des sédiments, des forêts, de la faune que les aménagements de l’homme. Cette complexité explique les nombreuses controverses qui agitent les projets et conduisent souvent à leur abandon.

D’après vous, comment le spectateur peut se saisir de ces questions ?

Un des défis du film a été de donner aux spectateurs le plaisir de la rencontre et de la découverte : aller sous l’eau ou derrière la cascade, percevoir le son des graviers, observer des invertébrés au microscope, écouter des scientifiques, rire avec complicité des mésaventures des radeliers…

Nous avons composé un dialogue entre une pluralité de points de vue techniques ou personnels, extérieurs ou immergés, humains ou non-humains. C’est d’après la juxtaposition de ces approches et leur complémentarité que naît une réflexion partagée sur l’acte de réparer une rivière. En cela, cette proposition filmique est politique. L’ensemble des savoirs et des observations singulières, sans prévalence à priori d’un régime de connaissance sur un autre, constitue la rivière.

Ainsi, le film fait le récit de la réparation parallèle : par les hommes sur la rivière en racontant les techniques de restauration ou en rendant visibles les regards protecteurs de scientifiques et de riverains, ensuite par la rivière sur les hommes en montrant la transformation du regard des radeliers sur l’environnement qui les entoure. 

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Entretien avec Émilien De Bortoli, réalisateur
Extrait du dossier pédagique

Quel est le langage cinématographique que vous utilisez pour mettre en lumière les différents points de vue du film ?

Les basculements entre les différentes perceptions passent par une plongée visuelle de l’émergé vers l’immergé, par le recours à plusieurs voies narratives, ainsi que par la convocation d’archives hétéroclites. Le collage participe à cette forme foisonnante et hybride de la rivière en confrontant des matériaux à priori éloignés.

De plus, l’usage organique de la musique et d’une plasticité visuelle sensorielle nous permettent de glisser de l’un à l’autre et de rendre visibles les multiples rapports qui peuvent devenir à partir d’un même objet. 

Par exemple, pour ressentir les barrages et ce qu’ils produisent sur la rivière, la caméra vient heurter l’ouvrage, pénétrer sous l’eau, rendre visible la structure en béton et la violence d’une chute d’eau. On comprend alors de façon sensorielle en quoi ces structures conduisent à une rupture dans la continuité de la rivière, empêchant espèces vivantes et sédiments de les franchir.

Les scientifiques sont filmés de manière particulière, pouvez-vous nous expliquer pourquoi ?

En effet. Par exemple, l’écologue Maria Alp, spécialiste des vies minuscules, est filmée à la même échelle que ses objets d’études. Son discours est observé à partir du détail de ses mains qui manipulent le microscope ou de sa peau. Pour filmer les sédiments, nous nous plaçons à leur échelle en recourant à des images sous-marines, en travaillant sur le flou de l’image, sur l’obstruction de l’objectif par les matières en suspension mais aussi sur la nature sonore des frottements. 

Marie_Lusson-Méandres ou la rivière inventée - festival vrai de vrai 2026 - Strasbourg - etoiles scam - le lieu documentaire

Marie Lusson est cinéaste et docteure en sociologie des sciences à l’Inrae (Montpellier). Ses recherches portent sur les projets de restauration de rivières comme champ d’expérimentation de politiques de la nature. Elle s’intéresse plus largement aux recompositions qu’entraîne la cohabitation entre humains, non-humains et non-vivants, notamment par l’ethnographie filmique.

Emilien_De_Bortoli-Méandres ou la rivière inventée - festival vrai de vrai 2026 - Strasbourg - etoiles scam - le lieu documentaire

Émilien De Bortoli est un artiste à plusieurs têtes. Il a étudié le cinéma à l’Université Paris Diderot et l’Institut International de l’Image et du Son ; la musique et la composition aux conservatoires de Cergy, Villeurbanne et Montpellier. À travers ses films, compositions, spectacles et inventions sonores, il interroge nos manières d’appréhender l’infime. Il tente par l’expérience sensorielle de rendre perceptibles d’autres rapports au monde, inspirés par un vivant grouillant et incontrôlable, rendu aujourd’hui trop silencieux.

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