En 2019, le réalisateur Leos Carax propose à Estelle Charlier et Romuald Collinet de concevoir, fabriquer et animer Annette, la marionnette de son nouveau film. Celle-ci sera l’enfant du couple que forment Marion Cotillard et Adam Driver.
Propulsé dans le monde du cinéma, commence alors pour ce duo charismatique une aventure unique et singulière dans leur parcours de marionnettistes. Face à l’exigence du cinéaste, à l’impossible, ils sont tenus…
Une évocation poétique de la compagnie « La Pendue » dans son quotidien, ses rituels, et face aux nombreux défis où les entraîna l’imagination furieuse de Leos Carax.

AVIS TÉLÉRAMA (TTT – Très bien)
« (…) Comment donner vie à cette poupée à la fois étrange et tellement humaine, expressive ? Grâce à la caméra de Sandrine Veysset (…), on a l’impression de pénétrer en catimini dans l’atelier de deux magiciens et de découvrir leurs secrets de fabrication. Émerveillement garanti. »
Marie SAUVION, telerama.fr, 25 août 2021.
« Sandrine Veysset a filmé toutes les étapes de la fabrication du petit personnage qui tient le rôle-titre d’Annette (…). Il n’est pas nécessaire d’avoir vu le long-métrage de Leos Carax pour être séduit par le film (…). Au-delà de ce regard en coulisses, c’est à une plongée captivante dans leur univers que nous invite la réalisatrice. (…) »
Sylvie KERVIEL, lemonde.fr, 1er septembre 2021.
« (…) [La] mission [des marionnettistes] enchâsse génie poétique, ingénierie et sens de la bricole : il s’agit aussi bien d’inventer les différents faciès et mouvements d’Annette que de définir un moyen de l’animer sans être vu, allongé sur une couche de matelas, planqué sous un amas de valises, voire d’être gommé à la palette graphique. Cet art de l’effacement est sans doute la part la plus touchante du documentaire. (…) »
Guillaume LOISON, nouvelobs.com, 1er septembre 2021.
« (…) Bien mené, ce beau documentaire rend hommage à l’art de ces acteurs de l’ombre qui parviennent à être surpris par leur propre création. « Lors de moments magiques, nous devenons spectateurs du jeu de la marionnette qui semble vivre sans nous. » »
Stéphane DREYFUS, la-croix.com, 1er septembre 2021.
TROIS BONNES RAISON DE VOIR LE DOCUMENTAIRE (AVIS FRANCE TÉLÉVISION). ET ILS ONT RAISON !
1 – Parce qu’on découvre le métier de marionnettiste sous un angle nouveau et poétique
A l’évocation du métier de marionnettiste, il serait aisé d’imaginer un monde poussiéreux, calfeutré, un peu désuet et uniquement destiné aux enfants. Détrompez-vous, Estelle Charlier et Romual Collinet nous démontrent tout le contraire.
« Baby Annette » est un documentaire qui met en relief le travail des marionnettistes d’une manière résolument moderne et captivante. Leur métier est décrit sous l’angle de la création, de l’innovation et de l’expérimentation. C’est un travail exigeant et impressionnant de précision qui nécessite de faire appel à des techniques nouvelles, de s’interroger sur ses savoir-faire pour les réinventer. Grâce à Estelle et Romuald, il devient évident que la marionnette est un art complexe et sophistiqué qui a encore un large champ à explorer. Pour preuve, les deux artistes passent énormément de temps à chercher, à tester, à tenter avant d’arriver au résultat escompté. Le marionnettiste n’est pas un artiste du passé, il est bien ancré dans le présent et sait faire appel aux techniques de son temps. L’apprentissage et le renouvellement de son art est constant.
Par ailleurs, il n’est pas possible d’évoquer Estelle et Romuald sans évoquer leur passion pour leur travail. L’amour qu’ils instillent dans leur art est omniprésent et touchant. De leur passion naît une véritable symbiose, entre eux d’abord, mais aussi avec la marionnette. Quand ils manipulent Annette, ils ne font plus qu’un avec elle, il ne sont plus qu’une seule et même entité. Ils se mettent entièrement au service de leur poupée. De leur passion et de leur rapport à cet objet si particulier naît une véritable poésie emprunte de douceur.
2 – Parce qu’il est fascinant de voir comment la poupée prend vie et devient presque organique au point de susciter l’émotion
Mettons nous d’accord : à l’origine, Annette n’est qu’une simple poupée, un objet inanimé. Tout l’enjeu du travail des marionnettistes consiste à lui donner vie, et dans le film de Léos Carax, cela revêt un sens particulièrement fort puisque la poupée tient un des rôles principaux. Elle est la fille d’un couple d’êtres humains, et ça n’est pas rien. Romuald le souligne ainsi : « Notre difficulté de marionnettiste c’était comment faire en sorte que le spectateur qui regarde le film, puisse accepter d’un seul coup, la marionnette à l’image. […] Le rapport au réel est vraiment questionné. »
Il a donc fallu trouver le bon dosage. D’abord, ne pas rendre la poupée trop réaliste pour ne pas générer une sensation dérangeante ou inquiétante. Ensuite, la rendre tout de même suffisamment réaliste pour permettre au spectateur de croire à son existence mais aussi de se laisser transporter et émouvoir par elle. Ce subtil équilibre à trouver est passé par un travail sur l’apparence de la marionnette, les matières et les textures utilisées, mais aussi sur les proportions comme l’indique Estelle Charlier : « J’ai essayé de rendre le personnage réaliste mais il ne fallait pas qu’il soit trop proche de l’humain pour ne pas tomber dans la vallée de l’étrange et qu’il soit dérangeant et gênant. Et du coup, j’ai rajouté des éléments comme ça, un peu disproportionnés, comme les oreilles. Ça lui fait quand même un visage de marionnette. »
3 – Parce qu’animer la marionnette est un défi artistique aussi bien que technique
Leos Carax se plaît à le rappeler régulièrement, « à l’impossible nous sommes tenu ». Nul doute que cette phrase résume à elle seule l’ampleur du défi que les deux marionnettistes ont du relever face à un réalisateur exigeant et peu familier du monde des marionnettes.
Dans le documentaire « Baby Annette », nous sommes invités à suivre le travail de recherche que mènent les deux artistes. Ces derniers explorent leur art, découvrent de nouvelles voies inexplorées. Nous assistons à la richesse du processus de création.

Estelle Charlier
Marionnettiste, comédienne et plasticienne
Initiée très jeune aux arts du théâtre et aux contes incarnés, elle a déjà joué cent personnages lorsqu’elle entreprend le conservatoire d’Art dramatique de Grenoble. Mais c’est sous le coup d’un hasard objectif qu’elle découvre la forme artistique qui résume et accomplit tout ce qui l’avait jusque là passionnée : la marionnette. Afin de s’y vouer pleinement, elle entre alors à l’ESNAM de Charleville- Mézières, où elle rencontre Romuald Collinet et fonde avec lui la compagnie La Pendue. Révérant le mystère de son art, elle aime engendrer des êtres artificiels et défier l’abîme avec ce théâtre de fortune apte à provoquer des décharges inédites.

Romuald Collinet
Metteur en scène, marionnettiste
Initié très jeune aux arts de la rue et à la bohème la plus aventureuse, il crée encore adolescent des spectacles de marionnettes dont les représentations rempliront son chapeau une dizaine d’années. S’il entreprend l’ESNAM, il quitte l’école de Charleville-Mézières avant terme afin d’être pleinement initié aux arcanes de Polichinelle et pouvoir faire naître le sien dans le vacarme des rues de Naples. Galvanisé par cette tradition populaire, il vient retrouver Estelle Charlier pour œuvrer au sein de La Pendue à de nouvelles versions de la vedette napolitaine comme à des recherches plus contemporaines et des réalisations à la frontière du spectacle vivant et de l’audio-visuel. Envisageant la marionnette comme une voie d’ascension, il cherche à affranchir son esprit par la création et la manipulation de corps artificiels.

Compagnie La Pendue
La Pendue, compagnie de théâtre, marionnettes et métamorphoses sensibles, fut créée en l’an 2003 à Grenoble par deux anciens élèves de l’Ecole Supérieure Nationale des Arts de la Marionnette (promotion 1999-2002) de Charleville-Mézières : Estelle Charlier et Romuald Collinet.
Gérée par l’association du Théâtre de l’Homme Ridicule, elle a bâti son atelier, son athanor et sa salle de répétition sur les hauteurs de Grenoble. Depuis cette favorable altitude, la compagnie décréta deux axes où lancer ses explorations.
Un axe traditionnel, centré sur la marionnette à gaine, selon lequel les marionnettistes se réapproprient le personnage quatre fois centenaire de Polichinelle pour le spectacle détonant « Poli Dégaine ».
Un axe contemporain recourant à de nombreuses techniques (marionnettes à fils, portées, ombres et autres encore non répertoriées) pour le spectacle « Tria Fata », projeté comme une grande évasion poétique, ainsi que pour « La Manékine », réinterprétation burlesque et psychédélique d’un conte médiéval.
Ces deux axes n’en partent pas moins du même désir de dévoiler l’humain original au moyen de sa réplique.
Après des tournées sur tous les continents, la compagnie s’engagea également dans de prestigieuses collaborations.
Avec Ilka Schönbein, Romuald Collinet fût conseiller artistique sur « La Vieille et la bête ».
Avec Leos Carax, Estelle Charlier et Romuald Collinet élaborèrent le personnage d’Annette, pour le film du même nom : visage, croissance et magies.

Enfant de la campagne, Sandrine Veysset suit des études de lettres et d’arts plastiques à Montpellier. Là, elle est engagée comme assistante décoratrice sur le tournage des « Amants du Pont-Neuf ». Arrivée à Paris en 1991, cette provinciale accepte de devenir le chauffeur de Leos Carax, tout en continuant à travailler comme décoratrice.
Encouragée par Carax, Sandrine Veysset décide de passer derrière la caméra pour raconter une histoire qui lui tient à cœur, « Y aura-t-il de la neige à Noël ? », le quotidien d’une agricultrice, épouse d’un homme violent et volage, qui élève ses sept enfants. Malgré l’obtention de l’Avance sur recettes, l’entreprise n’est pas aisée, puisque la cinéaste en herbe entend tourner son film sans star, et pendant trois saisons consécutives. Produite par Humbert Balsan, cette œuvre originale, à mi-chemin de la chronique rurale et du conte de fées, est couronnée de succès à sa sortie en 1996 : le Prix Louis Delluc, plus de 800 000 spectateurs et un César de la Meilleure première œuvre.
En 1998, Sandrine Veysset tourne son deuxième long métrage, « Victor… pendant qu’il est trop tard », sur la relation qui unit un garçonnet à une prostituée, mais le public et la critique sont déconcertés par cet opus onirique. Trois ans plus tard, elle brosse encore avec délicatesse le portrait de personnages à la dérive dans « Martha… Martha », présenté à la Quinzaine des Réalisateurs. Mais son sujet de prédilection reste l’enfance, comme en témoigne encore son audacieux quatrième film, « Il sera une fois » (2007), dans lequel un vieillard (Michael Lonsdale) se retrouve face à face avec le petit garçon qu’il a été…
PARTAGEONS NOTRE GOÛT POUR LE CINÉMA DOCUMENTAIRE
Tous nos rendez-vous autour du cinéma documentaire : projections, rencontres, festivals et ateliers